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Passe ton train : Les Racines du mal, Dantec

Sommes-nous tous des cas pathologiques pouvant se résumer à des configurations de données cognitives ?

Dantec (Maurice G.) 1995, Les Racines du mal, Gallimard, Folio

Note : 3 sur 5.

Résumé

Andreas Schaltzmann s’est retranché chez lui et tue de plus en plus, des manières les plus atroces car il est persuadé que le monde est envahi et contrôlé par une association secrète entre Aliens et Nazis, et qu’il est des derniers résistants. Il finit par être arrêté. Une équipe scientifique découvre que certains des crimes (notamment plus sexuels) qui lui sont imputés ne correspondent pas à son mode opératoire mais l’affaire leur est retirée.
Quelques années après, Arthur Darquandier, le spécialiste cognitif de l’équipe, revient à Paris et recrute ses anciens partenaires, le professeur Gombrowitz et surtout la belle russe Svetlana, pour reprendre l’enquête. Andreas est mort et des meurtres semblables à ceux sur lesquels ils enquêtaient se sont régulièrement produits, particulièrement autour des Alpes. L’appareil que Darquandier a conçu, la Neuromatrice, dans laquelle il peut entrer des données pour cerner une identité, est désormais capable de leur fournir une aide non-négligeable. L’appareil a notamment absorbé sa personnalité et celle d’Andreas…

Commentaires

Le scénario est particulièrement absorbant mais finit par virer au mélo-fantaisiste-gore à mesure qu’on en apprend sur le réseau de tueurs. Et ce, comme si le démantèlement de ce réseau menaçant posait problème et que l’intérêt était justement dans son existence secrète, non dans son dévoilement. C’est en cela que le roman dépasse son côté policier pour atteindre vraiment plus celui de roman de projection, science-fiction. Sur cette fin, l’écriture se laisse aller à plus de facilités ce qui est dommage pour un roman qui partait bien mais qui perd son alchimie aux deux tiers. Le style de Dantec part en tout sens, s’inspire de différents univers et pourtant n’est jamais ridicule ni trop difficile. Les théories du complot et du chaos, les polars noirs, la science-fiction, et même les comics américains irriguent et créent une certaine dynamique poétique dans tout ce mix plutôt réussi qui reste largement dans le vraisemblable. La face noire de l’homme, de son cerveau, constitue l’obsession de Dantec et s’étalera de plus en plus dans son œuvre tout comme cette théorie du complot qui, de source d’inspiration, finira par s’installer semble-t-il comme conception du monde chez l’auteur.

La machine à capturer les identités par l’ingestion de données a bien-sûr quelque chose de prophétique quand on pense à l’importance qu’a pris le « Big Data » au XXIe avec Amazon (qui fait l’essentiel de son argent en vendant ses données au gouvernement américain…). Ici cette invention sert un justicier aux allures de programmateur de la Silicon Valley, pour arrêter le complot, alors qu’une telle machine serait plutôt devenue l’arme du grand complot… Le justicier est d’ailleurs en tout point semblable au paranoïaque tueur à gages, les deux faces d’un même ennemi du grand complot.

Passages retenus

p.139
L’homme est à la fois une machine à contrôler le chaos, et un propagateur de désordre. […] Il oscille sans cesse entre des états imprévisibles, alors que son comportement statistique général reste à peu près stable.

p.312
Je me suis assuré que j’étais présentable, et en tout cas à peu près conforme au personnage fabriqué depuis des années.

Programmation des habitudes, p. 427
Toute habitude est en fait une sorte de « pilote automatique » de la conscience qui prend le relais après la phase d’apprentissage initiale… Un bébé met des semaines avant d’apprendre à marcher, puis peu à peu il se met à le faire automatiquement, sans effort apparent… Or, ceci est valable pour tout le reste, vous le savez bien… Conduire une voiture, lire, écrire, baiser… Tout peut être fait sans effort tendu de la conscience, à condition de le pratiquer suffisamment longtemps pour qu’il soit pris en charge par le « pilote automatique »… mais comme le souligne Wilson, le robot humain est plus efficace que n’importe quel animal. Et c’est cette efficacité qui cause notre perte, car elle engendre paresse et dépendance. Pire, elle engendre l’ennui… Et vous savez que l’ennui répétitif produit frustration et surtout dépression, donc perte de l’image de soi, fluctuation chaotique des contours de la personnalité.

Publié par Cyber Luron

Une nuit de prolo, je suivis par hasard un prince et entrai à la taverne des rêves et croyances. Carnaval de fantômes. Dans le cabaret des miracles, je cherchais le non-dit ; en coulisses, je démasquai les bavards littéraires et m'aperçus que j'en portais également ; à la tour des langues, je redescendis dans l'atelier. J'y oeuvre, contemplant la nature, songeant aux premiers hommes qui vivaient sans y penser, groupés.

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