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Imaginez la scène : Cromwell, de Victor Hugo

Le politique sur scène : avec la foule romantique, sans l’imposteur classique

Hugo (Victor) 1827, Cromwell, GF, 1968

Note : 3.5 sur 5.

Résumé

Cromwell a magistralement imposé sa superbe sur l’Angleterre. Il a chassé la monarchie et imposé un début de démocratie. Mais le faste de la vie lui donne la tentation de devenir roi. C’est pourquoi lords et puritains se réunissent pour le renverser. Le fils Richard Cromwell se trouve par erreur dans leur réunion dans un bouge de Londres. Mais le juif Manassé vend les conjurés puritains… L’intègre et radical Carr reste seul à s’opposer ouvertement à l’aspirant roi qui doute. Sir William Murray a été envoyé, déguisé en prêtre, pour servir auprès de Cromwell et ouvrir les portes aux conjurés la nuit venue. Mais il est sous les charmes de la jeune fille de celui-ci, mélangeant les billets à remettre. Le couronnement s’approche et la conjuration se reforme…

Commentaires

Effectivement injouable tant sur la longueur, mais aussi la quantité des intervenants. Ce foisonnement rend la pièce particulièrement brouillon avec des scènes qui finissent par sembler tout à fait dispensables (la réception des envoyés des pays étrangers). Si Hugo rompt avec les unités classiques, ainsi qu’avec la bienséance, et la séparation comique tragique (le ridicule de l’histoire d’amour du noble déguisé en prêtre) de manière grandiose et emphatique, le grotesque des interludes des paroles mystiques des fous renoue au contraire avec les chœurs antiques et donne une certaine ambiance, présence du monde extérieur, intrusion du peuple dans la vie politique, révolution romantique accompagnant la révolution sociale.

Ce mélange des genres illustre bien l’humanité imparfaite tant du révolutionnaire à la fois mégalomane et rongé par le doute, que des conjurés animés par l’idée noble de lutter contre un tyran mais abaissés par les intérêts égoïstes. La conjuration ratée pourrait faire penser à Cinna ou la clémence, tragédie classique de Corneille, mais la profusion des personnages, la faiblesse qui chez tous l’emporte sur les qualités et entraîne les uns et les autres dans l’échec, feront bien plus penser à une pièce baroque de Shakespeare comme Hamlet. Sir William Murray, tiraillé entre son devoir politique et son amour, est le personnage typique des tragédies classiques de Racine et Corneille. Ridiculement affublé, profondément malhabile, pas à sa place, il est l’incarnation de ce théâtre pour Hugo : anachronique, inadapté, grotesque et inconséquent.

Passages retenus

p. 183
– Quittez ces goûts bourgeois. – Hé pourquoi ? j’y suis née.
Aux grandeurs dès l’enfance étais-je condamnée ?
Ma vie aux airs de cours ne s’accoutume pas ;
Et vos robes à queues embarrassent mes pas.
Au banquet du lord-maire, hier, j’étais hypocondre.
Beau plaisir, de dîner tête à tête avec Londre !

p. 190
Malveillants ! mais dans l’ombre où se cachent vos pas,
J’ai toujours un flambeau, traîtres, qu’on n’éteint pas !

p. 244
Pour une double face il faut quatre soufflets.

p. 259
Toujours de tout désastre un bouffon se sauva.
Pour vieillir sur la terre, où tout est de passage,
Il faut se faire fou : c’est encore le plus sage.

p. 341 :
Qu’a-t-il besoin de cour ? de cortège ? de garde ?
Il chante, il rit, il passe, et nul ne le regarde.
Que lui fait l’avenir ? il aura bien toujours,
L’hiver, pour se vêtir, un lambeau de velours,
Un gîte, un peu de pain mendié par des rires.
Sans disputer sa vie aux embûches des sbires,
Il dort toutes ses nuits, n’a point de songe affreux,
Se réveille et ne pense à rien. – Qu’il est heureux !
Sa parole est du bruit ; son existence un rêve.
Et quand il atteindra le terme où tout s’achève,
Cette faux de la mort, dont nul ne se défend,
Ne sera qu’un hochet pour ce vieillard enfant !

p. 392
Le mystère est un œuf […] qu’il ne faut pas casser si l’on veut un poulet.

Publié par Cyber Luron

Une nuit de prolo, je suivis par hasard un prince et entrai à la taverne des rêves et croyances. Carnaval de fantômes. Dans le cabaret des miracles, je cherchais le non-dit ; en coulisses, je démasquai les bavards littéraires et m'aperçus que j'en portais également ; à la tour des langues, je redescendis dans l'atelier. J'y oeuvre, contemplant la nature, songeant aux premiers hommes qui vivaient sans y penser, groupés.

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