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Ramasse tes lettres : L’Inconsolable, d’Anne Godard

Pris dans le deuil, on sort de soi-même et on ausculte sans fin ce qui nous relie à l’être perdu

Godard (Anne) 2006, L’Inconsolable, Éditions de Minuit, 2008

Note : 3.5 sur 5.

Résumé

Une mère de famille s’est murée dans le deuil de son fils aîné, son fils préféré, celui qui jouait de la musique. Ses autres enfants et son mari ont fini par continuer leur vie plus loin, ne supportant plus cette attention totale tournée vers la mort. La mère attend le jour d’anniversaire de la mort de son fils, parle avec les photos dans le couloir, s’aperçoit que sa mémoire laisse presque partir quelques souvenirs. Est-elle satisfaite de cet état ?

Commentaires

Monologue à la deuxième personne – comme la mauvaise conscience accusatrice –, ce récit amène progressivement la mort comme un prétexte pour ne pas vivre, un amour égoïste dont la mort permet de fixer dans le temps et de rendre muet et parfait, adaptable aux souvenirs, malléable à souhait.

On trouvera tout de même que le récit se fait un peu long et le style répétitif malgré la vivacité du récit parsemé d’effets de discours directs libres. Le style finit par être sec à se cantonner à être celui de cette femme inconsolable tournée vers elle-même, mais sans vraiment d’émotions amenées par la vie. Pourtant l’écriture est brillante et toujours coule, manquant justement peut-être d’envolées. On l’aurait bien confrontée, cette dame, à des proches, des reproches pour voir son entêtement, mais c’est peut-être cet étouffement et cette stricte solitude, accompagnée d’un mort – son fils : une relation incestueuse et nauséabonde – qu’a voulu faire sentir Anne Godard. C’est dans ce cas totalement réussi, mais enferme le récit dans une posture narrative morbide difficile à digérer à l’échelle d’un roman, d’où la taille hybride entre la nouvelle et le roman. Car le récit n’est pas non plus nouvelle à proprement parler ; ce qu’on apprend du mort est finalement peu important, et le suspens ménagé ne sert pas à proposer une quelconque intensité finale. Ainsi l’œuvre est toute entière dans l’illustration par l’écriture (harmonie imitative, pourrions nous dire) de l’état de deuil, ici poussé à son optimum qui prend la forme d’un courant de conscience qui n’est plus caractérisé par le « je » mais par un « tu » qui est comme extériorisation de soi.

Passages retenus

p. 22
Tu te laisses dériver, au fil des dates, d’un absent à un autre, tous ennemis ce soir, plus qu’aucun autre jour, ennemis par leur indifférence que tu ne peux supporter d’imaginer, ennemis par leurs scrupules que tu espères et auxquels tu ne crois pas assez.

p. 71
Comme s’il suffisait d’un sac-poubelle pour se préserver du passé.

Publié par Cyber Luron

Une nuit de prolo, je suivis par hasard un prince et entrai à la taverne des rêves et croyances. Carnaval de fantômes. Dans le cabaret des miracles, je cherchais le non-dit ; en coulisses, je démasquai les bavards littéraires et m'aperçus que j'en portais également ; à la tour des langues, je redescendis dans l'atelier. J'y oeuvre, contemplant la nature, songeant aux premiers hommes qui vivaient sans y penser, groupés.

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