
Les échecs, exercice intellectuel surpuissant
Zweig (Stefan) 1943, Le Joueur d’échecs, Stock, 1990
traduit de l’allemand ?? (titre : Schachnovelle)
Résumé
Lors d’un voyage en bateau, le narrateur apprend que le champion du monde des échecs est également à bord. Il parvient à organiser une partie contre lui en réunissant plusieurs gentlemen pour faire équipe. Alors que la partie semble mal engagée, un curieux passe par là et les guide vers un match nul.
Le narrateur va à la rencontre de cet homme pour lui demander de faire une autre partie seul à seul avec le champion. Monsieur B. lui raconte pourquoi il ne veut pas, comment il a appris les échecs pendant son emprisonnement par les Nazis…
Commentaires
Court récit posthume, faisant un étrange éloge des échecs. A la fois jeu intellectuel remarquable, développant les facultés, remède contre la torture morale de l’isolement et des interrogatoires nazis, et jeu abrutissant que maîtrise un champion du monde méprisant, sans aucune délicatesse d’intelligence, et ce Monsieur B. qui a appris des parties par cœur et bascule dans la folie.
L’auteur attire l’attention par ces portraits acerbes des personnages reconnus socialement que sont le champion et l’ingénieur McConnor, imbus de leur réussite sociale mais obtus. Ainsi, l’intérêt premier du narrateur pour le champion est détourné sur cet humble et mystérieux Monsieur B.
La tombée dans la démence par la monomanie du jeu d’échecs pourrait être largement plus développée et poétisée par l’auteur – le papier peint, la découpe de la réalité…
Passages retenus
La puissance intellectuelle des échecs, p. 82 :
Ainsi, mon temps était rempli, au lieu de traîner avec l’inconsistance de la gélatine, et j’étais occupé sans excès, car le jeu d’échecs possède cette remarquable propriété de ne pas fatiguer l’esprit et d’augmenter bien plutôt sa souplesse et sa vivacité. Cela vient qu’en y jouant, on concentre toutes ses énergies intellectuelles sur un champ très étroit, même quand les problèmes sont ardus.