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Ramasse tes lettres : Le bizarre incident du chien pendant la nuit, Mark Haddon (jeunesse)

Un autiste mène l’enquête

Haddon (Mark) 2003, Le bizarre incident du chien pendant la nuit, Pocket jeunesse, 2005

Traduit de l’anglais (UK) par Odile Demange (titre original : The curious incident of the dog during the night-time)

Note : 4 sur 5.

Résumé

Un soir, Christopher, jeune autiste, trébuche sur le corps du chien de la voisine, Mme Shears. Qui a bien pu le tuer ? Christopher décide de mener l’enquête et de raconter son aventure dans un livre qu’il fait lire à sa professeure Siobhan. Mais voilà que son père lui interdit de continuer sa « foutue enquête ».

L’auteur : Mark Haddon (1962-)
Fait ses classes à Uppingham dans le Rutland (entre Leicester et Peterborough) avant de partir faire ses études en littérature anglaise à Oxford University. A partir des années 80, il publie des séries de livres pour la jeunesse (Agent Z, Baby Dinosaurs). En 2002, il écrit son premier roman destiné à un public adulte, Le bizarre incident du chien. Sa maison d’édition lui suggère de le publier également pour la jeunesse, il obtient de nombreux prix.

Commentaires

Préfacé par la professeure en psychopathologie et en psychanalyse Sophie de Mijolla-Mellor, ce livre peut se lire tout d’abord comme une sensibilisation à l’autisme.
Le personnage-narrateur est autiste, on suit donc son courant de pensée particulier, ses obsessions, émotions et réactions surprenantes. Et comme c’est cette parole seule qui fait avancer le récit, le lecteur est amené à partager cette autre logique et ses enchaînements pour suivre, ce qui le sensibilise à ce comportement particulier. Les réactions souvent désemparées des parents et des autres personnages devant Christopher, inscrites dans une logique comportementale habituelle, deviennent des injustices pour Christopher et pour sa logique désormais partagée par le lecteur.
Mais c’est en tant que roman policier que le personnage autiste et sa voix personnelle prennent un relief intéressant, confèrent une certaine poétique (faite d’un assemblage surprenant d’énigmes mathématiques, de dessins ou schémas, et d’informations non nécessaires, inattendues mais instructives). Si la trame n’est finalement pas très développée dans le sens de l’enquête et laisse vite place à une intrigue familiale, le regard particulier de Christopher, sa quête de détails, son raisonnement froid, comment il investit l’enquête de ses propres obsessions, ses peurs inattendues, tout cela enrichit profondément l’enquête, rapprochant ainsi Christopher de son héros Sherlock Holmes, tant par son excentricité que par sa tournure d’esprit particulière propre à l’enquête.
Il est intéressant de constater que le roman, initialement destiné à un public adulte, en raison sans doute du développement quasi documentaire de la personnalité d’un autiste, mais également des colères brutales du personnage (qui en vient à frapper son père et un policier), est un grand succès de la littérature jeunesse. Certes, l’intrigue familiale, accomplissement de soi à travers la quête des secrets de famille, est un thème de littérature de jeunesse. Mais on peut se demander si la réussite, si l’on écarte l’originalité de l’idée, ne vient pas justement du fait que l’auteur ne prend pas son lecteur pour un enfant incapable de comprendre, à qui l’on doit mâcher le travail, qu’on doit protéger et instruire moralement. Il ne se met pas à la hauteur d’enfant, mais donne une parole entière à l’autiste et laisse le lecteur à son interprétation.

Passages retenus

Le mal de l’étranger, pp. 71-72 :
D’habitude, je ne parle pas aux étrangers. Je n’aime pas parler aux étrangers. Ce n’est pas tellement à cause du Danger Etranger dont on nous parle à l’école, quand un homme bizarre vous offre des bonbons ou vous propose de faire un tour en voiture parce qu’il veut avoir des relations sexuelles avec vous. Ça, ça ne m’inquiète pas. Si un homme bizarre me touche, je le frapperai, et je peux frapper très fort. Par exemple, quand j’ai donné un coup de poing à Sarah parce qu’elle m’avait tiré les cheveux, je l’ai assommée et elle a eu une commotion cérébrale et on a dû l’emmener au Service des Urgences à l’Hôpital. En plus, j’ai toujours mon Couteau de l’Armée Suisse dans ma poche, et avec sa lame scie, je peux couper les doigts de quelqu’un.
Je n’aime pas les étrangers parce que je n’aime pas les gens que je n’ai jamais vus. J’ai du mal à les comprendre. C’est comme en France, là où on allait camper des fois pendant les vacances, quand Mère était vivante. Je détestais ça parce que je ne comprenais pas ce que disaient les gens dans les magasins, au restaurant ou à la plage, et ça me faisait peur.
Je mets longtemps à m’habituer aux gens que je ne connais pas. Par exemple quand il y a un nouveau membre du personnel à l’école, j’attends des semaines et des semaines avant de lui parler. D’abord je l’observe jusqu’à ce que je sois sûr qu’il ne soit pas dangereux. Puis je lui pose des questions sur lui, je lui demande s’il a des animaux domestiques, quelle est sa couleur préférée, ce qu’il sait des missions spatiales Apollo, je lui fais dessiner le plan de sa maison et je lui demande quelle voiture il a, et comme ça, je le connais. Alors ça m’est égal d’être dans la même pièce que lui et je n’ai pas besoin de le surveiller tout le temps.
Donc, c’était courageux de parler à d’autres gens de notre rue. Mais il faut être courageux pour faire une enquête, alors je n’avais pas le choix.

Publié par Cyber Luron

Une nuit de prolo, je suivis par hasard un prince et entrai à la taverne des rêves et croyances. Carnaval de fantômes. Dans le cabaret des miracles, je cherchais le non-dit ; en coulisses, je démasquai les bavards littéraires et m'aperçus que j'en portais également ; à la tour des langues, je redescendis dans l'atelier. J'y oeuvre, contemplant la nature, songeant aux premiers hommes qui vivaient sans y penser, groupés.

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