
La nature a toujours un spectacle à offrir
George Sand 1876, La Fée aux gros yeux [in Contes d’une grand mère, seconde série], Calmann-Lévy
Résumé
Miss Barbara, la gouvernante d’Elsie, a de gros yeux, très efficaces de près, qui lui font voir une infinité de petits détails. En revanche, elle a une grande peur des chauve-souris. Elle dit aussi organiser de grands bals le soir, où viennent de belles dames fabuleusement vêtues.
Contes d’une grand-mère, seconde série
- Le Chêne parlant
- Le Chien et la Fleur sacrée
- L’Orgue du Titan
- Ce que disent les fleurs
- Le Marteau rouge
- La Fée Poussière
- Le Gnome aux huîtres
- La Fée aux gros yeux
Commentaires
Conte concluant le recueil a des allures fantastiques par les inquiétantes connotations de la chauve-souris (figure de la nuit, de l’horreur, lié au vampire…) et par la magie féerique qu’évoque le bal des insectes. L’insecte est également apriori une figure négative de la nature : nuisible piquant l’homme, le tourmentant par sa petitesse insaisissable… Mais là encore, Sand invite à changer de regard, à voir à la loupe ses petits être pleins de couleur et de mouvements grâcieux. Un peu comme Lucrèce dans son De la nature, Sand cherche à retirer la peur de la nature, de la mort. L’homme n’est pas dans une lutte contre la nature, pour la survie (comme les interprétations simplistes tirées de mauvaises lectures de Darwin), il est un élément de ce magnifique spectacle de la nature dont il est un acteur parmi tant d’autres.
Passages retenus
Participer à la science de la nature, p. 133 :
Moi, je vois tout mon cher petit monde à la fois, je ne perds rien de ses allures et de ses fantaisies. Je vous en ai montré fort peu aujourd’hui. La soirée était trop fraîche et le vent ne donnait pas du bon côté. C’est dans les nuits d’orage que j’en vois des milliers se réfugiaient chez moi, ou que je les surprends dans leur abris de feuillage et de fleurs. Je vous en ai nommé quelques uns, mais il y a en a une multitude d’autres qui, selon la saison, éclosent à une courte existence d’ivresse, de parures et de fêtes. On ne les connaît pas tous, bien que certaines personnes savantes et patientes les étudient avec soin et publient de gros livres où ils sont admirablement représentés avec un fort grossissement pour les yeux faibles ; mais ces livres ne suffisent pas, et chaque personne bien douée et bien intentionnée peut grossir le catalogue acquis à la science par des découvertes et des observations nouvelles. Pour ma part, j’en ai trouvé un grand nombre qui n’ont encore ni leurs noms ni leurs portraits publiés, et je m’ingénie à réparer à leur profit l’ingratitude ou le dédain de la science.
7 commentaires sur « Renverse ton image : La Fée aux gros yeux, George Sand (conte) »